« En tant que patient, vous avez souvent le sentiment de devoir tout'endurer'. Le but de l'implication du patient est d'éviter ce sentiment. Et non, il n'y a pas de mot en néerlandais ou en français approprié pour qualifier cette « autonomisation » des patients. Nous avons donc opté pour l’utilisation du terme anglais « empowerment» à l'asbl pour éviter les traductions faussées. Tout comme « empowerment », le terme « patient empowerment » est utilisé dans le monde entier. Nous utilisons également le terme en anglais dans mes contacts avec la Fondation contre le Cancer. »
« Lorsqu’on tombe malade, on perd plus ou moins le contrôle de sa vie. Par exemple, un patient dépend de son médecin pour un certain nombre de choses : établir un diagnostic, effectuer une intervention chirurgicale, prescrire des médicaments, établir l'attestation de maintien à domicile en cas de maladie. En bref, en tant que patient, on ne peut pas se passer d'un médecin. Cette dépendance peut s'accompagner d'une perte de contrôle et d'autonomie, ce qui peut avoir une influence négative sur le bien-être du patient. Il perd une partie de sa liberté. L'autonomisation du patient, c'est restaurer au mieux le sentiment de contrôle et d'autonomie. Et la meilleure façon de créer ce sentiment est de communiquer. »
« Le médecin, quant à lui, dépend de ses patients pour ses revenus, mais aussi pour obtenir des informations nécessaires à poser un diagnostic. Et le médecin peut perdre des patients. La qualité de la relation patient-médecin joue donc dans les deux sens. La dépendance est réciproque, mais le médecin conserve la prépondérance du pouvoir. Et cela positionne le patient dans la position la plus vulnérable. C'est pourquoi il appartient en grande partie au fournisseur de soins de santé de responsabiliser le patient. »
Trois étapes
« Il y a trois étapes pour parvenir à l'empowerment du patient. En premier lieu, le patient doit être informé et acquérir des connaissances. Être informé en soi n'équivaut pas à l'empowerment, mais c'est une condition indispensable. La deuxième étape consiste pour le patient et le médecin à échanger des arguments, pour et contre un traitement particulier, par exemple. Dans une troisième phase, le patient et le médecin prendront des décisions ensemble, ce qui est également une condition préalable à l'empowerment du patient. Le mot "ensemble" est très important ici. Je ne tire pas cela d’un chapeau, mais sur la base de recherches scientifiques qui montrent qu'il existe une dépendance mutuelle. Les deux parties doivent s'écouter et partager le contrôle et la responsabilité. Si, après avoir parlé et discuté, vous décidez ensemble d'opter pour une certaine option, le patient doit également respecter les accords. C'est pourquoi je dis parfois qu'un patient a non seulement des droits, mais aussi des obligations. Il est important pour le médecin et le patient que la relation médecin-patient "clique" et qu'il y ait de la confiance, car en tant que patient, vous ne pouvez pas tout contrôler. En tant que patient, vous pouvez très bien vous informer, mais il y a des limites. Un médecin en sait plus sur les aspects techniques de la chimiothérapie et des autres traitements contre le cancer, sur l'imagerie médicale, etc que le patient lambda et le patient est sous sédation pendant l'intervention ! En tant que patient, vous devez pouvoir faire confiance à votre médecin. La relation de confiance est construite avec ce que l'on appelle des « points de confiance » à chaque contact. C'est comme l'amitié. Elle ne surgit pas après un seul rendez-vous, mais à travers une succession de contacts inspirant la confiance. »
Que pouvez-vous faire en tant que patient ?
- Vous pouvez préparer la consultation, par exemple en écrivant des questions, et vous pouvez vous faire accompagner, surtout s'il s'agit de conversations importantes. Les recherches montrent que le patient oublie une grande partie du contenu de ces conversations. Dans de tels cas, il est utile qu'une deuxième personne prenne des notes.
- Si vous avez de nombreuses questions, vous pouvez demander de prévoir une consultation plus longue lors de la prise de rendez-vous
- Si vous avez vous-même recherché des informations sur Internet, informez-en votre médecin. Vous pouvez également demander à votre médecin des adresses de sites web fiables.
- Si vous avez également recours à l'homéopathie, à l'acupuncture ou autres médecines alternatives en plus de votre traitement, votre médecin doit également en être averti.
- Si vous devez prendre une décision importante, vous pouvez demander à votre médecin un délai de réflexion. Vous pouvez aussi dire pourquoi vous ne désirez pas suivre l'un ou l'autre traitement, c'est important qu'il y ait une ouverture d’esprit mutuelle.
Un pas en avant
«Lors de mes conférences, je demande parfois au public s'il est satisfait des soins en Belgique, et dans la plupart des cas, il l’est. Lorsque je demande ensuite si les patients se sentent impliqués dans les soins et traités sur un pied d'égalité, beaucoup moins de personnes lèvent la main. Il y a donc certainement une place à l'amélioration, quelle que soit la qualité des soins. Vous remarquez également que les gens pensent de plus en plus à la participation et à l'implication des patients et c'est un grand pas en avant.
On parle souvent du patient comme d'un partenaire, ou du patient qui est central, mais je pense que le patient doit être - ou devenir - propriétaire de son processus de soins."
Internet n'est pas la panacée
« Le Web peut aider les patients à recueillir des informations et à mieux comprendre ce qui se passe et quand. Mais cette connaissance n'est pas encore une expertise.
« Dans le passé, c'était un art de trouver des informations, maintenant c'est un art de faire la distinction entre les informations valides et celles sans valeur. Malheureusement, les recherches montrent que la plupart des gens ne vérifient pas la source des informations qu'ils trouvent sur Internet et ne font donc pas de discrimination en termes de qualité. On constate aussi que le Web a le potentiel de réduire, mais pas de combler, le fossé entre les connaissances des patients et des médecins. Mes recherches ont cependant montré que la recherche d'informations sur Internet ne modifie pas la relation de pouvoir entre le médecin et le patient, mais modifie la communication. Et il ne faut pas perdre de vue qu'environ 10% des Belges n'ont pas accès à Internet et que tout le monde n'a pas la même maîtrise des technologies de l’information et de la communication ».
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